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dessus du peuple, il leur brisait sur la tête le niveau de l’égalité.

Cette hypocrisie visible, cette dénonciation sans preuve, cette personnalité assommante, cet intarissable moi qui se retrouvait partout dans ses paroles de plomb, étaient bien capables de refroidir, à la longue, les plus chauds amis de Robespierre. Ce n’était pas seulement l’effet laborieux de cette mâchoire pesante, qui mâchait et remâchait éternellement la même chose ; c’était aussi je ne sais quoi de discordant et de faux, qui, malgré le soin, le poli, tout l’effort académique, de temps à autre grinçait. Il n’y avait qu’un petit noyau, une toute petite église, des Jacobins les plus bornés, qui ne voulût voir ni entendre. Les autres haussaient les épaules. Il faut lire, dans un des journaux les plus favorables à Robespierre, les Révolutions de Paris, la respectueuse mais sévère critique qu’on n’hésite pas de lui adresser… « Quoi ! lui dit le journaliste entre autres choses judicieuses, vous nous dites que vous tenez dans les mains le fil d’une grande conspiration, il ne s’agit de rien moins que d’une guerre civile, et vous parlez toujours de vous, des petites provocations de vos ennemis ! Les patriotes qui vous estiment, qui vous aimeraient, si votre orgueil n’opposait une barrière entre eux et vous, ne peuvent s’empêcher de dire : « Quel dommage qu’il n’ait pas cette bonhomie antique, compagne ordinaire du génie et des vertus ? » (No 147, avril, 1792.)