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du parti des patriotes, qui se sauvait sur son toit.

L’abbé Mulot, vainqueur à Sorgues, ne résista pas à la tentation d’instruire la belle prisonnière du coup de vigueur qu’il avait frappé. Il lui écrivit ce billet : « Nous venons de porter le coup que nous devions porter au nom de la France ; j’en attends tout ; n’en voulez point à l’ami de votre fils. » Ce dernier mot était écrit sans doute pour que, si le billet était surpris en chemin, on n’accusât point Mme Niel d’avoir conseillé cette répression violente. Peut-être aussi cette dame, qui avait bien plus que l’abbé d’esprit et de sens, l’avait-elle détourné d’un acte odieux, dangereux, qui ne la délivrait point, irritait ses ennemis et pouvait la perdre. Le parti réellement fort dans Avignon, le parti papiste, celui des confréries et du petit peuple, travaillait à part, par ses voies à lui, et n’obéissait nullement au signal des royalistes constitutionnels, tels que les Niel et Mulot.

Le fatal billet fut surpris. Les patriotes d’Avignon écrivirent au médiateur des reproches amers, ces paroles entre autres, ironiquement copiées de son billet même : « Nous ne croyons pas que vous vouliez porter, au nom de la France, un coup dans le seul dessein de délivrer celui que vous croyez votre ami. »

Autre imprudence encore plus grave. Un autre admirateur de Mme Niel, M. de Clarental, capitaine de hussards, hasarda de lui écrire : « Du calme, ma belle dame, du secret, et voilà tout. Armez-vous de patience, leur règne ne sera plus long ; ils jouent de leur reste, ils seront punis. »