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peu, en grelottant, nos gens reviennent à toutes jambes.

Qui avait vaincu ? La Vierge. C’est elle, les dames de Carpentras l’assurèrent ainsi, qui, sensible à leurs prières, se chargea seule de répondre à cette farouche armée, et sans arme qu’un peu de pluie jetée aux visages les renvoya pour être chansonnés des femmes et des petits enfants. Une table de bronze éternisa la mémoire de ce miracle ; une fête votive dut reproduire d’année en année le triomphe de la Vierge, l’humiliante déconfiture des sacrilèges d’Avignon.

Ceux-ci, rentrés à petit bruit, eurent cruellement à souffrir de la joie des aristocrates. On n’osait les railler en face ; mais de loin, mille petites flèches leur étaient lancées qui leur revenaient par voies indirectes. Les demi-sourires des femmes, les plaisanteries que des amis charitables s’empressent toujours de rapporter à ceux qui en sont l’objet, les remplissaient de fureur. Ils commencèrent à se sentir tout entourés d’ennemis ; pleins de défiance et de crainte, ils se tournèrent vers leur adversaire naturel, le clergé, exigèrent de lui le serment civique. Mais leur échec de Carpentras les avait fait baisser dans l’opinion. Le fanatisme, enhardi, tenta un coup désespéré, qui, s’il restait impuni, brisait le parti français. Les magistrats patriotes de la ville de Vaison, Anselme et La Villasse, leur avaient demandé d’envoyer d’Avignon un curé constitutionnel, l’ancien ayant émigré. Ce fut l’arrêt de leur mort. On