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qu’il ne revînt les chercher, tout ce qu’il avait de courtisans et de prêtres, leur ouvrir les portes bien grandes.

À sa place allaient entrer dans Paris les vrais rois de la république, les rois de la pensée, ceux par qui la France avait conquis l’Europe ; je parle de Voltaire, de Rousseau. Voltaire, parti de son tombeau, était en marche vers Paris, où il entra en triomphe le 11 juillet. Que l’entrée eût été plus belle, si l’on n’eût eu la maladresse d’y ramener le fatal automate de l’Ancien-Régime, le roi des prêtres et des dévots !


Il faut pourtant raconter par quelles pitoyables machines la vieille idole fut relevée de terre. Routine, habitude, faiblesse, facile entraînement de cœur ; par-dessus, l’intrigue, qui l’exploite et qui s’en moque, voilà le fonds de l’histoire.

Les intrigants de nuances diverses qui travaillaient pour la cour sous le masque constitutionnel, se trouvaient désappointés ; elle les avait joués eux-mêmes. Il s’agissait maintenant pour eux de savoir avec quel parti de l’Assemblée le roi, devenu libre, voudrait bien négocier. Un de ces personnages équivoques, d’André, député de Provence, sorte de Figaro politique, qui (selon Weber) recevait trois mille francs par mois pour jouer les deux partis, sut des premiers l’évasion et alla chez La Fayette. Il était près de sept heures, et l’on devait croire que les fugitifs avaient gagné beaucoup de terrain. La Fayette dormait du sommeil du juste, de ce profond sommeil