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charme fatal qui tant de siècles rendit ces biens morts, en effet, inertes, souvent improductifs[1], semblait peser sur eux encore. Une chose rompit le charme, leur rendit le mouvement, les fit partir, s’écouler, circuler de .main en main ; ce fut le délai de neuf mois, lequel entraînait la facilité de sous-vendre et de détailler, donnait le temps de tirer déjà quelque chose des sous-acquéreurs, etc.

La déclaration de Pilnitz, la solennelle menace des rois à la Révolution, est datée du 27 août 1791. Et le 26 du même mois, le rapport du comité d’aliénation, annonçant ce fait si grave que la vente a pris l’essor, qu’elle est déjà de un milliard, fait prévoir que la Révolution est maintenant lancée sans retour, qu’elle ne sera pas violente seulement, mais ferme et profonde, qu’elle ne touche pas la surface du pays, mais le fonds et le tréfonds ; quoi que veuillent ou fassent les rois, elle sera à jamais irrévocable, invincible.

  1. Le soin intelligent avec lequel le clergé faisait cultiver certaines vignes de luxe, tel et tel clos célèbres, a donné à ses cultures une réputation bien peu méritée. L’administration ecclésiastique avait à la fois deux défauts qui semblent s’exclure : la mobilité et l’inertie. — La mobilité : les mutations continuelles de bénéfices et le changement de bénéficiers mettaient dans l’existence du fermier une incertitude fâcheuse ; la mutation, en certain cas, pouvait le déposséder inopinément. — L’inertie : l’activité, le progrès, n’étaient nullement encouragés par un corps dont les revenus dépassaient infiniment les besoins ; les constructions immenses, et souvent sans utilité, que firent au dix-huitième siècle, les corporations monastiques, montrent que, positivement et à la lettre, elles ne savaient plus que faire de leurs revenus. Dans plusieurs, le nombre des moines était réduit presque à rien ; Saint-Vandrille, par exemple, fondé pour mille moines, n’en nourrissait plus que quatre. Comment s’étonner si l’administration de ces maisons était inerte et négligente, les cultures peu encouragées ? etc.