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non moins déchu, devenu impopulaire, et qui ne pouvait plus rien. La mort attendait la mort, et le néant, le néant[1].

La force du royalisme était ailleurs, dans l’embrasement fanatique que les prêtres, sur un vaste plan d’incendie, allumaient, attisaient partout. Vous auriez dit de la France comme d’une maison fermée qui brûle en dedans ; l’incendie se trahit par places, avec des signes différents : ici, une fauve lueur, plus haut la fumée, là-bas l’étincelle.

Dans la Bretagne, par exemple, les curés, presque tous nommés maires en 1789, restaient maires de fait, magistrats de la Révolution contre la Révolution. Nul moyen d’organiser les municipalités nouvelles. Une force immense d’inertie, un vaste et farouche silence sur tout le pays, une attente manifeste.

En Vendée, chaque seigneur s’était fait nommer commandant de la garde nationale, et son régisseur était souvent maire. Le dimanche, après la messe, les paysans leur demandaient : « Quand commençons-nous ? » On avait vu, justement en juin, vers l’époque du voyage de Varennes, nombre d’émigrés revenir, sur l’espoir d’un grand mouvement. L’un d’eux, le jeune et dévot Lescure, avait cru venir se battre pour le roi et la religion ; sa famille le maria. Il se trouva fort à point que la tante de Mme de Lescure

  1. Et le pis, c’est que Barnave, qui se dévouait pour la reine, se défiait d’elle et craignait sa duplicité ; il exigeait qu’elle lui montrât toutes ses lettres. (Voir Mme Campan.) Avait-il tort ? Je ne le sais. Le roi de Suède, qui probablement savait bien la pensée des Tuileries, écrit peu après à Bouillé (décembre) que tout ce qu’on veut, c’est « d’endormir l’Assemblée ».