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bourgeoise, analogue aux lois électorales qui ont régné de 1815 à 1848.

Les électeurs à deux cent cinquante francs de revenu, avec l’adoucissement qu’on donna encore à la loi en faveur des fermiers, étaient dans un nombre immense. Les citoyens actifs (électeurs des électeurs, payant trois journées de travail) étaient entre trois et quatre millions.

Les seuls citoyens actifs étaient gardes nationaux ; encore une distinction irritante, de plus, à peu près inutile ; la différence était légère entre celui qui payait trois jours de travail et celui qui ne payait rien ; le premier donnait-il beaucoup plus de garanties que l’autre ? Qui pouvait le décider ?

Visiblement l’Assemblée, pendant la revision, se survivait à elle-même, chaque jour moindre de nombre, plus petite d’aspect et de dignité. Elle tarissait misérablement. Ses penseurs illustres se taisaient ou parlaient peu. Généralement ils laissaient l’initiative à un homme de troisième ordre, homme d’affaires et d’expédients, politique industrieux, d’André, dont tout l’art était d’employer les formes jacobines à servir la royauté. Pour mieux désorienter le public, il attaquait volontiers les royalistes, jusqu’à appuyer un jour la proposition de déclarer déchus les trois cents qui protestaient. Sa figure triviale, son costume soigneusement négligé, aidaient à l’illusion. Cependant un je ne sais quoi d’un Frontin de comédie qu’il portait sur son visage (c’est à son ami Dumont que nous devons ce portrait) révélait l’habile