Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 3.djvu/20

Cette page a été validée par deux contributeurs.

la ramener. « On a effacé du serment, dit-il, le mot infâme de roi… Plus de rois, plus de mangeurs d’hommes ! On changeait souvent le nom jusqu’ici, et l’on gardait toujours la chose… Point de régent, point de dictateur, point de protecteur, point d’Orléans, point de La Fayette… Je n’aime point ce fils de Philippe d’Orléans, qui prend justement ce jour pour monter la garde aux Tuileries, ni son père, qu’on ne voit jamais a l’Assemblée, et qui vint se montrer hier sur la terrasse, à la porte des Feuillants… Est-ce qu’une nation a besoin d’être toujours en tutelle ?… Que nos départements se confédèrent et déclarent qu’ils ne veulent ni tyran, ni monarque, ni protecteur, ni régent, qui sont des ombres de roi, aussi funestes à la chose publique que l’ombre de cet arbre maudit, le Bohon Upas, dont l’ombre est mortelle. »

Et dans un autre numéro : « Enfin on a retrouvé

    sévérité, avec équité et modération, précisément comme les jugera la postérité. — Bonneville n’a point de notice, que je sache, dans aucun dictionnaire biographique. Il était petit-neveu de Racine et l’a souvent imité, copié même (par droit de famille, dit-il), dans son poème mystique qu’il appelle une tragédie : L’année MDCCLXXXIX ou les Tribuns du peuple. Il y a quelques beaux vers. — M. Tissot, professeur de philosophie, raconte, dans un fort bel article d’un journal de province, qu’il vit encore Bonneville à Paris en 1824. « Il traînait ses derniers jours au fond d’une arrière-boutique (rue des Grès, 14), où il avait été recueilli par une vieille marchande de bouquins, presque aussi pauvre que lui, et qui était restée son admiratrice enthousiaste. Elle cachait son dévouement avec cette exquise pudeur dans le bien… Pour la rassurer, il fallait la certitude d’une communauté de sentiments et de culte. Oh ! alors elle était heureuse de parler de M. Bonneville, de raconter sa vie, d’offrir, avec un certain mystère, un recueil de poésies nationales… Cette année même, Bonneville, qui n’était déjà presque plus de ce monde, finit par le quitter tout à fait ; il ne tarda pas à être suivi par sa bienfaitrice, dont je vois encore les larmes tomber sur sa robe de deuil. »