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est là aujourd’hui. C’est pour cela que je cherche dans la création de garanties sociales et mutuelles un contrepoids à la propriété, qui soit tel, que la propriété perdant ses vices double ses avantages ; voilà ce que vous avez vis-à-vis de moi le tort de méconnaître…

J’aurais trop à vous dire sur cette matière, que je crois connaître à fond, par une longue étude et une longue pratique commerciale ; je me borne à ces quelques mots qui, sans doute, suffiront à rassurer votre esprit. Ne craignez rien pour la liberté et la personnalité de l’homme, je vous dirai même : ne craignez rien pour la propriété, car il m’est évident que vous ne la prenez point comme moi dans la signification juridique et capitaliste que lui ont donnée nos traditions et nos institutions.

Je finis, Monsieur, en vous renouvelant l’expression de ma haute estime et de mon admiration sans réserve. Vous m’avez fait connaître Vico, vous m’avez initié aux origines du droit, vous venez de me faire voir la Révolution telle qu’elle a été, telle que je la veux : je vous remercie.

Pour tant de services le pouvoir vous ferme la bouche : consolez-vous, les Jésuites n’en ont pas pour longtemps. Ils sont si près de leur ruine, ruine épouvantable, que, malgré toute mon aversion, je n’ai pas la force de les maudire.

Je suis, Monsieur, votre tout dévoué et obligé lecteur.

P.-J. PROUDHON.