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Quelque légitime que pût être cet enthousiasme, le brillant discours de Brissot, comme celui de Pétion, comme tous ceux qu’on fit en ce sens, péchait en un point. Il supposait qu’on pouvait isoler deux questions inséparables, celle du procès du roi et celle du gouvernement qui pouvait le remplacer. Brissot affectait de croire ce qu’il était impossible qu’il crût en effet, à savoir, qu’on pouvait frapper le roi sans frapper la royauté ; que cette institution, jugée elle-même implicitement dans le jugement de l’homme, scrutée, mise à jour dans ses défauts intrinsèques, survivrait à cette épreuve. Il y avait là un défaut de franchise et d’audace, un reste d’hésitation qu’on retrouve dans les discours des principaux meneurs de l’opinion, dans celui que Condorcet fit au Cercle social, dans celui que Robespierre fit aux Jacobins.

Le 13 enfin, l’Assemblée aborde la formidable question ; les tribunes soigneusement garnies de gens sûrs, entrés d’avance avec des billets spéciaux, les avenues pleines de royalistes inquiets, de gentilshommes que la foule appelait les chevaliers du poignard. Sur la proposition d’un membre, on ferma les Tuileries.

Le rapport solennel qui allait décider de la monarchie, rapport fait au nom de cinq comités, fut présenté par un M. Muguet, député inconnu, de la bande des Lameth. Rien d’habile ni de politique, une plaidoirie d’avocat, qui ne connaît rien hors des textes : 1o la fuite du roi n’est pas un cas prévu dans la