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Elle aussi, elle retourna, elle revint pensive dans son désert au clos de La Platière, qui lui parut, plus qu’à l’ordinaire encore, stérile et aride. Peu propre alors aux travaux techniques dont l’occupait son mari, elle lisait le Procès-verbal si intéressant des électeurs de 1789, la révolution du 14 juillet, la prise de la Bastille. Le hasard voulut justement qu’un de ces électeurs, M. Bancal des Issarts, fût adressé aux Roland par leurs amis de Lyon et passât quelques jours chez eux. M. Bancal, d’une famille de fabricants de Montpellier, mais transplantée à Clermont, y avait été notaire ; il venait de quitter cette position lucrative pour se livrer tout entier aux études de son choix, aux recherches politiques et philanthropiques, aux devoirs du citoyen. Il avait environ quarante ans, rien de brillant, mais beaucoup de douceur et de sensibilité, un cœur bon et charitable. Il avait eu une éducation fort religieuse, et, après avoir traversé une période philosophique et politique, la Convention, une longue captivité en Autriche, il est mort dans de grands sentiments de piété, dans la lecture de la Bible, qu’il s’essayait à lire en hébreu.

Il fut amené à La Platière par un jeune médecin, Lanthenas, ami des Roland, qui vivait beaucoup chez eux, y passait des semaines, des mois, travaillant avec eux, pour eux, faisant leurs commissions. La douceur de Lanthenas, la sensibilité de Bancal des Issarts, la bonté austère mais chaleureuse de Roland, leur amour commun du beau et du bon, leur atta-