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morale, idéale, que leur prête la volonté de l’État, leur créateur. L’État les fit ; il les fait vivre. Utiles, il les a soutenus ; nuisibles, il leur retire sa volonté, qui fait toute leur vie et leur raison d’être.

À quoi Maury répondait : « Non, l’État ne nous créa point, nous existons sans l’État. » Ce qui valait autant que dire : Nous sommes un État dans l’État, un principe rival d’un principe, une lutte, une guerre organisée, la discorde permanente au nom de la charité et de l’union.

Le 3 novembre, l’Assemblée décréta que les biens du Clergé étaient à la disposition de la nation. En décembre, elle décrétera, aux termes posés par Thouret : Que le Clergé est déchu d’être un ordre, qu’il n’existe point (comme corps).

Le 3 novembre est un grand jour. Il brise les parlements, et déjà les États provinciaux.

Le même jour, rapport de Thouret sur l’organisation départementale, sur la nécessité de diviser les provinces, de rompre ces fausses nationalités, malveillantes et résistantes, pour constituer dans l’esprit de l’unité une nation véritable.

Qui avait intérêt à maintenir ces vieilles divisions, toutes ces rivalités haineuses, à conserver des Gascons, des Provençaux, des Bretons, à empêcher les Français d’être une France ? Ceux qui régnaient dans les provinces, les parlements, les États provinciaux, ces fausses images de la liberté qui, pendant si longtemps, en avaient donné une ombre, un leurre, l’avaient empêchée de naître.