Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 2.djvu/60

Cette page a été validée par deux contributeurs.

roi. Mais La Fayette n’aimait ni n’estimait Mirabeau. La cour les détestait tous deux.

Un moment, un court moment, les deux forces qui restaient, la popularité, le génie, s’entendirent au profit de la royauté. Un événement fortuit qui se passa justement à la porte de l’Assemblée, deux ou trois jours après son arrivée à Paris, l’effraya, la poussa à désirer l’ordre à tout prix. Un malentendu cruel fit périr un boulanger[1] (21 octobre). Le meurtrier fut sur-le-champ jugé, pendu. Ce fut pour la municipalité l’occasion de demander une loi de sévérité et de force. L’Assemblée décréta la loi martiale, qui armait les municipalités du droit de requérir les troupes et la garde citoyenne, pour dissiper les rassemblements. En même temps, elle renvoyait les crimes de lèse-nation à un vieux tribunal royal, au Châtelet, petit tribunal pour une si grande mission. Buzot et Robespierre disaient qu’il fallait créer une haute cour nationale. Mirabeau se hasarda jusqu’à dire que toutes ces mesures étaient impuissantes, mais qu’il fallait rendre force au pouvoir exécutif, ne pas le laisser se prévaloir de sa propre annihilation.

Ceci le 21 octobre. Que de chemin depuis le 6 ! En quinze jours le roi avait repris tant de terrain que l’audacieux orateur plaçait sans détour le salut de la France dans la force de la royauté.

  1. Ce crime, commis à la porte de l’Assemblée et qui lui fit voter sur-le-champ des lois répressives, ne pouvait profiter qu’aux royalistes. Je crois pourtant qu’il fut le pur effet du hasard, des défiances et de l’irritation de la misère.