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son voisin : « Le voyez-vous, le voilà ! » Il fallut qu’il parût au balcon, et ce furent des applaudissements unanimes. Il fallut qu’il descendît au jardin, qu’il répondît de plus près à l’attendrissement du peuple.

Sa sœur, Madame Élisabeth, jeune et innocente personne, fut touchée, ouvrit ses fenêtres et soupa devant la foule. Les femmes approchaient avec leurs enfants, la bénissant, lui disant qu’elle était belle.

On avait pu, dès la veille, le soir même du 6 octobre, se rassurer tout à fait sur ce peuple dont on avait eu tant peur. Lorsque le roi et la reine parurent à l’Hôtel de Ville entre les flambeaux, un tonnerre monta de la Grève, mais de cris de joie, d’amour, de reconnaissance pour le roi qui venait vivre au milieu d’eux… Ils pleuraient comme des enfants, se tendaient les mains, s’embrassaient les uns les autres[1].

« La Révolution est finie, disait-on, voilà le roi délivré de ce Versailles, de ses courtisans, de ses conseillers. » Et en effet ce mauvais enchantement qui depuis plus d’un siècle tenait la royauté captive, loin des hommes, dans un monde de statues, d’automates plus artificiels encore, grâce à Dieu, il était rompu. Le roi était replacé dans la nature réelle, dans la vie et la vérité. Ramené de ce long exil, il revenait chez lui, rentrait à sa vraie place, se trouvait rétabli

  1. Tout ceci et ce qui va suivre est tiré des écrivains royalistes : Weber, I, 257 ; Beaulieu, II, 203, etc.

    Leur témoignage est conforme à celui de l’Histoire des deux amis de la liberté, IV, 2-6.