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ménagées, et croyant au fond qu’elles ne risquent pas grand’chose. Aussi faisaient-elles audacieusement tout ce que n’osaient faire leurs prêtres. Elles allaient, venaient, portaient les nouvelles, parlaient haut et fort. Sans parler des victimes obligées de leur irritation (je parle des maris, persécutés dans leur intérieur, poussés à bout de refus, d’aigreurs, de reproches), elles étendaient leurs rigueurs à beaucoup de petites gens de leur clientèle ou de leur maison ; malheur aux marchands philosophes, aux fournisseurs patriotes ! Les femmes fuyaient leurs boutiques, toutes les pratiques allaient aux boutiques bien pensantes.

Les églises étaient désertes. Les couvents ouvraient leurs chapelles à la foule des contre-révolutionnaires, athées hier, dévots aujourd’hui. Chose plus grave, ces couvents maintenaient audacieusement leurs clôtures, tenaient leurs portes fermées sur les reclus ou recluses qui voulaient sortir, aux termes des décrets de l’Assemblée.

Une dame de Saint-Benoît, ayant insisté pour rentrer dans sa famille, fut en butte à mille outrages. On refusa de lui laisser emporter les petits objets sans valeur pour lesquels les religieuses ont souvent beaucoup d’attache. On la mit, comme nue, à la porte. Les parents étant venus réclamer, on leur jeta, sans ouvrir, quelques bardes par la fenêtre, comme si elles contenaient la peste ; on les accabla d’injures.

L’Assemblée nationale reçut une pétition de la mère d’une autre religieuse, que l’on retenait de