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les émigrations ; mais c’est par une discussion solennelle que vous devrez reconnaître l’impossibilité ou les dangers d’une telle loi. » Et puis il resta témoin muet de cette discussion. Que Mirabeau s’y compromît, ou les ennemis de Mirabeau (Duport et Lameth), Robespierre devait toujours y trouver son avantage.

Amis, ennemis de Mirabeau, tous désiraient qu’il parlât, pour sa gloire ou pour sa perte. Dans six billets qu’il reçut, coup sur coup, en un moment, on le sommait de proclamer ses principes, et en même temps on lui montrait l’état violent de Paris. Il entendit parfaitement l’appel qu’on faisait à son courage et, pour ne tenir personne en suspens, lut une page vigoureuse que, huit ans auparavant, il avait écrite au roi de Prusse sur la liberté d’émigrer. Et il demanda que l’Assemblée déclarât ne vouloir entendre le projet, qu’elle passât à l’ordre du jour.

Nulle réplique de Duport, nulle des Lameth, nulle de Barnave. Profond silence. Ils laissent parler les gens en sous-ordre, Rewbell, Prieur et Muguet. Rewbell établit qu’en temps de guerre, émigrer, c’est déserter. Or c’était là justement le nœud de la situation : était-on en temps de guerre ? On pouvait dire non ou oui. Tant que l’état de guerre n’est pas déclaré, les lois de la paix subsistent, et la liberté pour tous d’entrer, de sortir.

On lut le projet de loi. Il confiait à trois personnes, que l’Assemblée nommerait, le droit dictatorial d’au-