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l’eût fait attendre. Ce fut comme une petite fête. Le mot d’ordre fut donné pour faire valoir dans l’opinion les aimables qualités de l’élève de Mme de Genlis. Desmoulins mit en tête d’un de ses numéros une touchante gravure, représentant le jeune prince, au lit des malades, à l’Hôtel-Dieu, et faisant une saignée.

Les Orléanistes marchaient bien, n’eût été le duc d’Orléans. On avait beau tâcher de le rendre ambitieux ; il était, avant tout, avare. Par là il gâtait d’un côté ce qu’on faisait pour lui de l’autre. Le premier usage qu’il fit de sa popularité renaissante fut de tirer du comité des finances une promesse de lui payer le capital d’une somme dont sa maison recevait la rente depuis le Régent. Le Régent, qu’on ne présente que comme un prodigue, méritait ce nom à coup sûr ; mais ce qui était moins connu, c’était son avidité. Ce prince, voulant sans bourse délier faire prendre au duc de Modène sa fille (fort décriée), s’adresse au roi, à son pupille, et fait signer à ce petit garçon de onze ans, un enfant dépendant de lui, une dot de quatre millions aux dépens du Trésor royal.

Le Trésor était à sec ; dans la déplorable détresse d’une banqueroute de trois milliards et du système de Law, on ne put que payer la rente. Voilà qu’au bout de soixante-dix ans, à une époque aussi misérable, dans la pénurie extrême de janvier 1791, le duc d’Orléans vient réclamer le capital ; sans droit, de toute façon, car la dot n’avait été donnée à la fille qu’autant qu’elle renoncerait à tous ses droits en