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les uns, l’amour du plaisir, de l’argent ; dans les autres, l’aigreur et la haine.

Le plus grand obstacle, nous le répétons, fut la passion, bien plus que l’opposition des idées.

Et ce qui manqua à ces hommes, du reste si éminents, ce fut le sacrifice, l’immolation de la passion. Le cœur, si j’osais le dire, quoique grand dans plusieurs d’entre eux, le cœur et l’amour du peuple ne furent pas assez grands encore.

Voilà ce qui, les tenant isolés, sans lien, faibles, les obligea, dans le péril, de chercher tous une force factice dans l’exagération, dans la violence ; voilà ce qui mit tous les orateurs de clubs, tous les rédacteurs de journaux à la suite de celui qui, plus égaré, pouvait être sanguinaire sans hésitation ni remords. Voilà ce qui attela toute la presse à la charrette de Marat.

Des causes personnelles, souvent bien petites, misérablement humaines, contribuaient à les faire tous violents. Ne rougissons pas d’en parler.

La profonde incertitude où se trouvait le génie le plus fort, le plus pénétrant peut-être de toute la Révolution (c’est de Danton que je parle), sa fluctuation entre les partis qui lui faisait, dit-on, recevoir de plusieurs côtés, comment pouvait-il la couvrir ? Sous des paroles violentes.

Son brillant ami, Camille Desmoulins, le plus grand écrivain du temps, plus pur d’argent, mais plus faible, est un artiste mobile. La concurrence de Marat, sa fixité dans la fureur, que personne ne peut