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avoir trouvé de la résine qui conduisait parfaitement l’électricité. Charles tâta, et sentit une aiguille cachée dans la résine, qui faisait tout le mystère.

La Révolution trouva Marat dans la maison du comte d’Artois[1], au centre des abus, des prodigalités, au milieu d’une jeune noblesse insolente, c’est-à-dire au lieu même où l’on pouvait le mieux connaître, haïr l’Ancien-Régime. Il se trouva tout d’abord, et sans transition, lancé dans le mouvement. Il arrivait d’un voyage d’Angleterre quand eut lieu l’explosion du 14 juillet. Son imagination fut saisie de ce spectacle unique ; l’ivresse lui gagna le cerveau et ne le quitta plus. Sa vanité aussi s’était trouvée flattée d’un hasard qui lui fit jouer un rôle dans la grande journée. Si l’on en croit une note qu’il envoya aux journalistes, trois mois après le 14 juillet, Marat se trouvant, ce jour même, dans la foule qui couvrait le Pont-Neuf, un détachement de hussards aurait poussé jusque-là, et Marat, servant d’organe à la foule, leur eût commandé de poser les armes, ce qu’ils ne jugèrent pas à propos de faire. Marat ne s’en comparait pas moins modestement à Horatius Coclès qui, seul sur un pont, arrête une armée.

Mécontent des journalistes, qui ne l’avaient pas loué dignement, Marat vendit (il l’assure) les draps de son lit pour commencer un journal. Il essaya de

  1. Plusieurs personnes, encore vivantes, croient qu’il appartenait à M. de Calonne, et affirment avoir lu des brochures contre-révolutionnaires de Marat. Cependant, quelques recherches que j’aie faites, je n’ai pu les découvrir. — La Fayette (Mém., II, 286) assure que, « deux mois avant la Révolution, Marat était parti pour Londres, en clabaudant contre la démocratie ».