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volumes, dit-il, de découvertes physiques), il ajoute froidement : « Je crois avoir épuisé toutes les combinaisons de l’esprit humain sur la morale, la philosophie et la politique. »

Comme Rousseau, comme la plupart des gens de son pays, il partit de bonne heure pour chercher fortune, emportant avec son magasin mal rangé de connaissances diverses, le talent plus profitable de tirer des simples quelques remèdes empiriques ; tous ces Suisses de montagne sont quelque peu botanistes, droguistes, etc. Marat se donne ordinairement le titre de docteur en médecine. Je n’ai pu vérifier s’il l’avait réellement.

Cette ressource incertaine ne fournissait pas tellement qu’à l’exemple de Rousseau, à l’exemple du héros de la Nouvelle Héloïse, il ne fût aussi parfois précepteur, maître de langues. Comme tel ou comme médecin, il eut occasion de s’insinuer près des femmes ; il fut quelque temps le Saint-Preux d’une Julie qu’il avait guérie. Cette Julie, une marquise délaissée de son mari qui l’avait rendue malade, fut sensible au zèle du jeune médecin, plus qu’à sa figure. Marat était fort petit ; il avait le visage large, osseux, le nez épaté. Avec cela, il est vrai, d’incontestables qualités, le désintéressement, la sobriété, un travail infatigable, beaucoup d’ardeur, beaucoup trop ; la vanité gâtait tout en lui.

La Suisse a toujours fourni l’Angleterre de maîtres de langues et de gouvernantes. En 1772, Marat enseignait le français à Édimbourg. Il avait alors vingt-