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vos prêtres la faisaient taire, cette doctrine, par le fer et par le feu, qu’elle n’existât pas dans le cœur de l’homme, qu’elle ne criât pas contre eux ? — En quelle année, s’il vous plaît, est-elle née ? Donnez-moi la date du droit éternel.

J’avais lu toutes ces belles choses dans ce pêle-mêle allemand qu’on appelait Le Catholique, où M. d’Eckstein, avec une certaine verve trouble, brouillait toutes sortes de doctrines, de théories empruntées. C’est la source principale où ceux-ci ont puisé ce qu’ils savent du Moyen-âge catholique. Seulement, comme si ce brouillard leur semblait encore trop clair, ils ajoutent tout ce qu’ils ont d’ignorances, de confusions, de malentendus. Les ténèbres bien épaissies, redoublées par des non-sens, ils se sont là-dedans commodément établis, et là fait un tel mélange de formules, d’abracadabra, que rien de pareil n’a eu lieu depuis la scène des trois sorcières de Macbeth. Vous entendez du dehors toutes sortes de doctrines violées, accouplées, torturées, hurler dans la nuit. Chacune d’elles est mêlée aux autres, d’une manière d’autant plus impitoyable et barbare qu’ils ne savent la vraie nature, la portée d’aucune. Chacune prise de seconde main, dans des extraits infidèles, dans des traductions inexactes, n’ayant plus ni figure ni forme, finit par se prêter à tout. La série des épurations, des rectifications préalables par lesquelles il faudrait faire passer chaque élément de ce mélange, avant d’en venir à discuter l’informe Babel, décourage, les bras en tombent.