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mille ans, arrivée enfin hier et déjà près de périr ! Arrachée d’un coup tout à l’heure à ceux qui l’avaient embrassée, mise au fond de leur cœur, comme la meilleure part d’eux-mêmes. Ce n’était plus un bien extérieur qu’il s’agissait de leur ôter, mais leur vie… Nul n’eût survécu.

Pour faire justice aux Jacobins, il faut se replacer au moment et dans la situation, comprendre les nécessités où ils se trouvèrent.

Ils étaient en face d’une association immense, mi-partie d’idiots et mi-partie de coquins, ce qu’on appelait, ce qu’on appelle le monde des honnêtes gens.

D’une part, deux délateurs : le roi, qui tout à l’heure dénonce son peuple à l’Europe, et le prêtre, qui dénonce le peuple aux simples, aux femmes, à la Vendée.

D’autre part, l’inepte alliance de La Fayette avec Bouillé, au profit de celui-ci, et qui (avec bonne intention) irait mettre la Révolution aux mains de ses ennemis.

Qui peut dire, dans le détail, ville par ville, dans les campagnes et les villages, ce que c’était que l’association du monde des honnêtes gens ?

Du monde-prêtres, du monde-femmes, du monde-nobles et quasi nobles.

Les femmes ! quelle puissance ! Avec de tels auxiliaires, qu’est-il besoin de la presse ? Leur parole est un véhicule bien autrement efficace. Vraie force, d’autant plus forte qu’elle n’a rien de cassant, qu’elle