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de Bouillé d’avancer ; on ne put l’arracher du canon qu’à grands coups de baïonnette.

Bouillé accourt, se rend maître de la porte, lance ses hussards dans la ville, à travers une fusillade très nourrie qui partait de toutes les fenêtres. Ce n’était pas évidemment Châteauvieux seul qui tirait, ni seulement les gardes nationaux de la banlieue, mais la plus grande partie de la population pauvre s’était déclarée pour les Suisses. Cependant les officiers des deux régiments français suivirent l’exemple de Désilles, et avec plus de bonheur ; ils parvinrent à retenir les troupes dans les casernes. Dès lors Bouillé ne pouvait manquer de venir à bout de la ville.

Le soir, l’ordre était rétabli, les régiments français partis, les Suisses de Châteauvieux moitié tués, moitié prisonniers. Ceux qui ne se rendirent pas de suite furent trouvés, les jours suivants, égorgés. Trois jours après, on en prit encore un, qu’on coupa en morceaux dans le marché ; dix mille témoins l’ont pu voir.

Après le massacre, la ville eut un spectacle plus affreux encore, un supplice immense. Les officiers suisses ne se contentèrent pas de décimer ce qui restait de leurs soldats, il y eût eu trop peu de victimes : ils en firent pendre vingt et un. Cette atrocité dura tout un jour ; et, pour couronner la fête, le vingt-deuxième fut roué.

L’ignoble, l’infâme pour nous, c’est que ces Nérons ayant condamné encore cinquante Suisses aux