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Au second âge, qui viendra tôt ou tard, elle sortira des formules, trouvera sa foi religieuse (où toute loi politique se fonde), et dans cette liberté divine que donne seule l’excellence du cœur, elle portera un fruit inconnu de bonté, de fraternité.

Voilà l’infini moral qui couvait dans ce peuple (et qu’est-ce auprès que tout génie mortel ?), quand, le 14 juillet, à midi, il leva la main.

Ce jour-là, tout était possible. Toute division avait cessé ; il n’y avait ni noblesse, ni bourgeoisie, ni peuple. L’avenir fut présent… C’est-à-dire plus de temps… Un éclair de l’éternité.

Il ne tenait à rien, ce semble, que l’âge social et religieux de la Révolution, qui recule encore devant nous, ne se réalisât. Si l’héroïque bonté de ce moment eût pu se soutenir, le genre humain gagnait un siècle ou davantage ; il se trouvait avoir, d’un bond, franchi un monde de douleurs…

Un tel état dure-t-il ? Était-il bien possible que les barrières sociales, abaissées ce jour-là, fussent laissées à terre, que la confiance subsistât entre des hommes de classes, d’intérêts, d’opinions diverses ?

Difficile, à coup sûr, moins difficile pourtant qu’à nulle époque de l’histoire du monde.

Des instincts magnanimes avaient éclaté dans toutes les classes, qui simplifiaient tout. Des nœuds insolubles avant et après se résolvaient alors d’eux-mêmes.

Telle défiance, raisonnable peut-être au début de