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taires. La Fédération n’a pas suffi, L’institution des nouveaux pouvoirs n’a pas suffi ; il faut une force extra-légale. Contre la vaste conspiration qui se prépare, il faut une conspiration. Vienne celle des Jacobins et qu’elle enveloppe la France.

Deux mille quatre cents sociétés dans autant de villes ou villages s’y rattachent en moins de deux ans. Grande et terrible machine qui donne à la Révolution une incalculable force, qui seule peut la sauver, dans la ruine des pouvoirs publics ; mais aussi elle en modifie profondément le caractère, elle en change, en altère la primitive inspiration.

Cette inspiration fut toute de confiance et de bienveillance. Candeur et crédulité, c’est le caractère du premier âge révolutionnaire, qui a passé sans retour… Touchante histoire qu’on ne relira jamais sans larmes… Il s’y mêle un sourire amer. Quoi ! nous étions donc si jeunes, tellement faciles à tromper ! Quoi ! dupes à ce point !… N’importe ! Qu’on en rie, si l’on veut, nous ne nous repentirons jamais d’avoir été cette nation confiante et clémente.


J’ai lu bien des histoires de révolutions, et je puis affirmer ce qu’avouait un royaliste en 1791, c’est que jamais grande révolution n’avait coûté moins de sang, moins de larmes. Les désordres, inséparables d’un tel bouleversement, ont été grossis à plaisir, complaisamment exagérés, d’après les récits passionnés que nos ennemis recevaient, sollicitaient de tous ceux qui avaient souffert.