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vivifiantes odeurs de la campagne, à ce beau moment de fécondité. On s’y promène parmi les blés mûrs.

Et c’était, en effet, en pleine campagne que tout cela se faisait. Nul temple n’aurait suffi. La population sortait tout entière, tous les hommes, toutes les femmes et tous les enfants ; on y traînait la chaise du vieillard, le berceau du nourrisson. Des villages, des villes entières, étaient laissées sous la garde de la foi publique. Quelques hommes en patrouille, qui traversent un bourg, déposent qu’ils n’y ont vu exactement que les chiens. Celui qui, le 14 juillet 1790 à midi, aurait, sans voir la campagne, parcouru ces villages déserts, les aurait pris pour autant d’Herculanum et de Pompéi.

Personne ne pouvait manquer à la fête ; personne n’était simple témoin ; tous étaient acteurs, depuis le centenaire jusqu’au nouveau-né. Et celui-ci plus qu’un autre.

On l’apportait, fleur vivante, parmi les fleurs de la moisson. Sa mère l’offrait, le déposait sur l’autel. Mais il n’avait pas seulement le rôle passif d’une offrande, il était actif aussi, il comptait comme personne, il faisait son serment civique par la bouche de sa mère, il réclamait sa dignité d’homme et de Français, il était mis déjà en possession de la patrie, il entrait dans l’espérance.

Oui, l’enfant, l’avenir, c’était le principal acteur. La commune elle-même, dans une fête du Dauphiné, est couronnée dans son principal magistrat par un