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lors tout le peuple. S’il n’y avait eu personne dans le Midi pour venger une telle chose, tout le Centre, tout le Nord, tout se serait mis en marche. L’outrage était senti au fond des moindres villages. J’ai sous les yeux les adresses menaçantes des populations de Marne et de Seine-et-Marne sur ces indignités du Midi[1].

Le Nord pouvait rester tranquille. Le Midi suffisait bien. Bordeaux, la première, s’élance, Toulouse, sur laquelle comptaient ceux de Montauban, Toulouse a tourné contre eux, elle demande à les châtier. Bordeaux avance, et, grossi au passage par toutes les communes, les renvoie, ne pouvant nourrir tous ces torrents de soldats. Les prisonniers de Montauban (c’est là toute la défense que rêvent les meurtriers) seront mis à l’avant-garde et recevront les premiers coups… L’avant-garde, il n’y en a plus ; le régiment de Languedoc fraternise avec Bordeaux.

On envoya de Paris un commissaire du roi, officier de La Fayette, homme doux, plus que modéré, qui se déclara plutôt contre son propre parti ; il renvoya les Bordelais, composa avec l’émeute. Nulle enquête sur le sang versé ; les morts restèrent là bien morts, les blessés gardèrent leurs blessures, les emprisonnés restèrent en prison ; le commissaire du roi n’avisa d’autre moyen de les en tirer que de se faire

  1. J’ai lu, je crois, tout ce qui de près ou de loin se rapporter à ces affaires de Montauban, de Nîmes, etc. Je n’ai rien écrit qu’après avoir comparé, pesé les témoignages et formé ma conviction avec l’attention d’un juré. Ceci une fois pour toutes. Je cite peu, pour ne pas rompre l’unité de mon récit.