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On travaillait partout en même temps à la formation des nouvelles compagnies. La composition en était bizarre, des agents ecclésiastiques et des paysans, des marquis et des domestiques, des nobles et des crocheteurs. En attendant les fusils, ils avaient des fourches et des faux. On fabriquait secrètement une arme perfide et terrible, des fourches dont le dos était une scie.

Les municipalités créées par les catholiques fermaient les yeux sur tout cela ; elles semblaient tout occupées de fortifier les forts, d’affaiblir encore les faibles. À Montauban, les protestants, six fois moins nombreux que leurs adversaires, voulaient accéder au pacte fédératif que venaient de faire les protestants de la campagne ; la municipalité ne le permit pas. Ils essayèrent alors de désarmer la haine, en se retirant des fonctions publiques auxquelles on les avaient portés, y faisant nommer des catholiques à leur place. Cela fut pris pour faiblesse. La croisade religieuse n’en fut pas moins prêchée dans les églises. Les vicaires généraux exaltèrent encore le peuple, en faisant faire, pour le salut de la religion en péril, des prières de Quarante-Heures.

La municipalité de Montauban se démasqua à la fin par une chose qui ne pouvait manquer d’amener l’explosion. Pour exécuter le décret de l’Assemblée qui ordonnait de faire inventaire dans les communautés religieuses, elle prit juste le 10 mai, le jour des Rogations. C’est aussi dans une fête de printemps qu’on fit les Vêpres siciliennes.