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accusations, d’entrevoir la réalité ! — En même temps s’affermit la foi, que ce monstrueux régime, contre la nature, contre Dieu, ne pouvait jamais revenir. La Révolution, quand elle vit, sans voile et sans masque, la face hideuse de son adversaire, s’affermit sur elle-même, se sentit vivre, et pour toujours… Oui, quels qu’aient été les obstacles, les haltes, les trahisons, elle vit et vivra !

Un signe de cette foi forte, c’est que, dans la détresse universelle, parmi plus d’une émeute contre les impôts indirects, l’impôt direct fut régulièrement, religieusement payé.

On met en vente quatre cents millions de biens ecclésiastiques. Et la seule ville de Paris en achète pour deux cents millions. Toutes les municipalités suivent.

Cette marche était très bonne. Peu de gens auraient voulu exproprier eux-mêmes le Clergé ; les municipalités seules pouvaient se charger de cette opération pénible. Elles devaient acheter, puis revendre. L’hésitation était grande, surtout chez le paysan ; voilà pourquoi les villes devaient lui donner l’exemple, acheter, revendre d’abord les maisons ecclésiastiques ; puis viendrait la vente des terres.

Tous ces biens servaient d’hypothèque au papier-monnaie qui fut créé par l’Assemblée. À chaque papier un lot était assigné, affecté ; ces billets furent dits assignats. Chaque papier était du bien, de la terre mobilisée. Rien de commun avec les fameux billets de la Régence, fondés sur le Mississipi, sur des terres lointaines et possibles.