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le roi ou menteur ou transfuge, déserteur de son propre parti. Le roi n’était donc plus royaliste ? Ou bien il sacrifiait son Clergé, sa fidèle Noblesse, pour sauver un lambeau de royauté ?

M. de Bouillé, laissé sans instructions, dans l’ignorance absolue de ce qu’il avait à faire, tombe alors dans le plus profond découragement. Telle est aussi l’impression de beaucoup de gentilshommes, d’officiers de terre et de mer, qui partent de France. M. de Bouillé lui-même demande la permission d’en faire autant, de servir à l’étranger. Le roi lui fait dire de rester, qu’il aura besoin de lui. On s’est trop hâté d’espérer ; la Révolution était finie le 14 juillet, finie le 6 octobre, elle l’était au 4 février ; je crains maintenant qu’en mars elle ne le soit pas encore.


Qu’importe ! la liberté, adulte, robuste au berceau même, doit craindre peu les résistances. Elle vient, en un moment de vaincre la plus redoutable, le désordre et l’anarchie. Ces pillages des campagnes, cette guerre contre les châteaux, qui, gagnant de proche en proche, menaçait tout le pays d’un embrasement immense, tout cela a fini d’un coup. Le mouvement de janvier, février, est déjà apaisé en mars. Pendant que le roi se présentait comme l’unique garant de la paix publique, pendant que l’Assemblée cherchait et ne trouvait pas les moyens de la ramener, la France l’avait faite elle-même. L’élan de la fraternité avait devancé les lois ; le