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n’avait vu dans sa jeune femme qu’un pur agent de l’Autriche[1].

Marié malgré lui par M. de Choiseul dans cette maison deux fois ennemie, comme Lorraine et comme Autriche, obligé de recevoir le précepteur de la reine, l’abbé de Vermond, espion de Marie-Thérèse, il persévéra longtemps dans sa défiance, jusqu’à rester dix-neuf ans sans parler à ce Vermond.

On sait comment la pieuse impératrice avait distribué les rôles à sa nombreuse famille, employant surtout ses filles comme agents de sa politique. Par Caroline, elle gouvernait Naples. Par Marie-Antoinette, elle comptait gouverner la France. Celle-ci, avant tout, Lorraine, Autrichienne, persécuta dix ans Louis XVI pour lui faire donner le ministère au Lorrain Choiseul, l’homme de l’Impératrice. Elle réussit du moins à lui faire accepter Breteuil, qui, comme Choiseul, avait été d’abord ambassadeur à Vienne, et comme lui appartenait entièrement à cette cour. Ce fut encore la même influence (celle de Vermond sur la reine) qui, en dernier lieu, surmonta les scrupules de Louis XVI et lui fit prendre un athée pour premier ministre, l’archevêque de Toulouse.

La mort de Marie-Thérèse, les paroles sévères de Joseph II sur Versailles et sur sa sœur, semblaient

  1. Il surveillait sa correspondance avec Vienne, par Thugut, à qui elle se confiait. (Lettre en date du 17 octobre 1774, citée par Brissot, Mémoires, IV, 120.)