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de noblesse y venait, un monde indiscret, futile, compromettant, qui croyait, comme au temps de la Fronde, mener tout par des satires, des mots piquants, des chansons. On lisait là le très spirituel journal des Actes des apôtres ; on y chanta telle romance sur la captivité du roi qui fit pleurer tout le monde, les amis et les ennemis.

Les relations de Marie-Antoinette étaient toutes avec les nobles, peu avec les prêtres. Elle n’était pas bigote, pas plus que son frère Joseph II.

Les nobles n’étaient pas un parti : c’était une classe nombreuse divisée et sans lien. Mais les prêtres étaient un parti, un corps très serré et matériellement très puissant. La dissidence momentanée des curés et des prélats le faisait paraître faible. Mais la force de la hiérarchie, mais l’esprit de corps, mais le pape, la voix du Saint-Siège, allait tout à l’heure refaire l’unité du Clergé. Alors, par ses membres inférieurs, il allait puiser des forces inconnues dans la terre et dans les hommes de la terre, les habitants des campagnes. Il allait contre le peuple de la Révolution amener un peuple, la Vendée contre la France.

Marie-Antoinette ne vit rien de tout cela. Ces grandes forces morales étaient lettres closes pour elle. Elle rêvait la victoire, la force matérielle, Bouillé et l’Autriche.

Lorsque, au 10 août, on trouva dans l’armoire de fer les papiers de Louis XVI, on lut avec étonnement que, dans les premières années de son mariage, il