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rejetez-vous la tête ?… Il y a là apparemment une puissance de vertige et d’attraction dangereuse…

Nos grands politiques ont aussi, il faut le dire, une raison mystérieuse d’éviter ces questions. Ils croient que le Christianisme est encore un grand parti, qu’il est bon de ménager. Pourquoi se brouiller avec lui ?… Ils aiment mieux lui sourire, en se tenant à distance, lui faire politesse sans se compromettre… Ils croient d’ailleurs que cette foule religieuse est généralement fort simple, qu’il suffira, pour l’amuser, de vanter un peu l’Évangile. Cela n’engage pas beaucoup. L’Évangile, dans sa vague moralité, ne contient presque aucun des dogmes qui firent du Christianisme une religion si positive, si prenante et si absorbante, si forte pour envelopper l’homme. Dire, comme les mahométans, que Jésus est un grand prophète, ce n’est pas être chrétien.

L’autre parti réclame-t-il ? Le zèle de Dieu qui le dévore lui met-il au cœur une indignation sérieuse contre ce jeu des politiques ? Nullement, il crie beaucoup, mais sur des choses accessoires ; sur le fond, il est trop heureux qu’on ne l’inquiète jamais. Les ménagements un peu légers des politiques, et parfois suspects d’ironie, ne lui font pas trop de chagrin. Il leur laisse croire qu’il s’y trompe. Tout vieux qu’il est, il a encore une prise infinie sur le monde. Pendant que les autres tournent dans leur manège parlementaire, roulant leur roue inutile, s’épuisant sans avancer, lui, le vieux parti, il tient encore ce qui est le fond de la vie, la famille et le foyer, la