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prendre le succès comme le jugement de Dieu, ils ont eu, au fond de leur cœur, sous leur douleur et leur colère, un misérable argument pour amnistier l’ennemi. Beaucoup se sont dit tout bas : « Il est fort, donc il est juste. »

Ainsi deux maux, les plus graves qui puissent affliger un peuple, ont frappé la France à la fois. Sa propre tradition lui est échappée, elle s’est oubliée elle-même. Et chaque jour plus incertaine, plus pâle et plus fugitive, a flotté devant ses yeux la douteuse image du Droit.

Ne cherchez pas pourquoi ce peuple va baissant, s’affaiblissant. N’expliquez pas sa décadence par des causes extérieures ; qu’il n’accuse ni le ciel ni la terre ; le mal est en lui.

Qu’une tyrannie insidieuse ait eu prise pour le corrompre, c’est qu’il était corruptible. Elle l’a trouvé faible, désarmé, tout prêt pour la tentation ; il avait perdu de vue l’idée qui seule le soutenait ; il allait, misérable aveugle, à tâtons dans la voie fangeuse, il ne voyait plus son étoile… Quelle ? l’astre de la victoire ?… Non, le soleil de la Justice et de la Révolution.

Que les puissances de ténèbres aient travaillé par toute la terre pour éteindre la lumière de la France, opérer l’éclipsé du Droit, cela était naturel. Mais jamais, avec tous leurs efforts, elles n’y auraient réussi. L’étrange, c’est que les amis de la lumière ont aidé ses ennemis à la voiler et l’obscurcir.

Le parti de la Liberté a présenté, aux derniers