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de l’avenue de Sceaux ; plus bas encore, les dragons ; derrière la grille, les Suisses. M. d’Estaing, au nom de la municipalité de Versailles, ordonne aux troupes de s’opposer au désordre, de concert avec la garde nationale. La municipalité avait poussé la précaution jusqu’à autoriser d’Estaing à suivre le roi, s’il s’éloignait, sous la condition singulière de le ramener à Versailles le plus tôt possible. D’Estaing s’en tint au dernier ordre, monta au château, laissa la garde nationale de Versailles s’arranger comme elle voudrait. Son second, M. de Gouvernet, laisse aussi son poste et va se placer parmi les gardes du corps, aimant mieux, dit-il, être avec des gens qui sachent se battre et sabrer. Lecointre, le lieutenant-colonel, resta seul pour commander.

Cependant Maillard arrivait à l’Assemblée nationale. Toutes les femmes voulaient entrer. 11 eut la plus grande peine à leur persuader de ne faire entrer que quinze des leurs. Elles se placèrent à la barre, ayant à leur tête le Garde-française dont on a parlé, une femme qui au bout d’une perche portait un tambour de basque, et au milieu le gigantesque huissier, en habit noir déchiré, l’épée à la main. Le soldat, avec pétulance, prit la parole, dit à l’Assemblée que, le matin, personne ne trouvant de pain chez les boulangers, il avait voulu sonner le tocsin, qu’on avait failli le pendre, qu’il avait dû son salut aux dames qui l’accompagnaient. « Nous venons, dit-il, demander du pain et la punition des gardes du corps qui ont insulté la cocarde… Nous sommes de bons patriotes ;