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famer. On ne manquait plus d’argent ; on en avait ramassé, retiré de tous côtés ; on croyait être sûr d’avoir un million cinq cent mille francs par mois. Le Clergé suppléerait le reste ; un procureur de bénédictins répondait à lui seul de cent mille écus.

Le vieil amiral écrivit le lundi 14 à la reine : « J’ai toujours dormi la veille d’un combat naval, mais depuis la terrible révélation je n’ai pas pu fermer l’œil… » En la recevant à table de M. de La Fayette, il frémissait qu’un seul domestique ne l’entendit : « Je lui ai observé qu’un mot de sa bouche pouvait devenir un signal de mort. » À quoi La Fayette, avec son flegme américain, aurait répondu « qu’il y aurait avantage qu’un seul mourût pour le salut de tous ». — La seule tête en péril eût été celle de la reine.

L’ambassadeur d’Espagne en dit autant à d’Estaing ; il savait tout d’un homme considérable à qui l’on avait proposé de signer une liste d’association que la cour faisait circuler.

Ainsi, ce profond secret, ce mystère courait les salons le 13, du 14 au 16 les rues. Le 16, les grenadiers des Gardes-françaises, devenus garde nationale soldée, déclarèrent qu’ils voulaient aller à Versailles reprendre leur ancien service, garder le château, le roi. Le 22, le grand complot était imprimé dans les Révolutions de Paris. Toute la France le lisait.

M. de La Fayette, qui se croyait fort, trop fort, ce sont ses propres termes, voulait d’une part contenir la cour en lui faisant peur de Paris, et d’autre part