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Si elle ne faisait rien, elle semblait encourager le désordre, autoriser l’assassinat ; elle fournissait un texte aux calomnies éternelles.

Si elle essayait de remédier au désordre, de relever l’autorité, elle rendait, au roi ? non, mais à la reine, à la cour, l’épée que le peuple avait brisée dans leurs mains.

Dans l’une et l’autre hypothèse, l’arbitraire et le bon plaisir allaient être rétablis, pour la vieille royauté ou la royauté de la rue… On démolit en ce moment l’odieux symbole de l’arbitraire, la Bastille, et voilà qu’un autre arbitraire, une Bastille, se relève… L’Anglais se frotte ici les mains, il remercie la Lanterne : « Grâce à Dieu, dit-il, la Bastille ne disparaîtra jamais. »

Qu’auriez-vous fait ? Dites-le, officieux conseillers, nos amis les ennemis, sages de l’aristocratie européenne, qui si soigneusement arrosez de calomnie la haine que vous avez plantée. Assis à votre aise sur le cadavre de l’Irlande, de l’Italie, de la Pologne, veuillez nous répondre ; vos révolutions d’intérêts n’ont-elles pas coûté plus de sang que nos révolutions d’idées ?…

Qu’auriez-vous fait ?… Sans nul doute, ce que, la veille et le lendemain du 22 juillet, conseillaient Lally-Tollendal, Mounier, Malouet ; ils voulaient, pour rétablir l’ordre, qu’on rendît le pouvoir au roi ; Lally se confiait tout à fait aux vertus du roi, Malouet voulait qu’on priât le roi d’user de sa puissance, de prêter main-forte au pouvoir municipal. Le roi aurait armé, et le peuple non ; point de garde nationale… Le