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désert… La foi ne sera plus dans aucun pouvoir mortel.

Le pouvoir législatif lui-même, cette Assemblée chère à la France, elle a maintenant ce malheur d’avoir absorbé ses ennemis, cinq ou six cents nobles et prêtres, et de les contenir dans son sein. Autre mal, elle a trop vaincu, elle va être maintenant l’autorité, le gouvernement, le roi… Et tout roi est impossible.

Le pouvoir électoral, qui de même s’est trouvé obligé de se faire gouvernement, en quelques jours il est tué ; il le sent, il prie les districts de lui créer un successeur. Au canon de la Bastille, il a frémi, il a douté. Gens de peu de foi ?… Perfides ? Non. Cette bourgeoisie de 1789, nourrie du grand siècle de la philosophie, était certainement moins égoïste que la nôtre. Elle était flottante, incertaine, hardie de principes, timide d’application ; elle avait servi si longtemps !

C’est la vertu du pouvoir judiciaire, lorsqu’il reste entier et fort, de suppléer tous les autres ; et lui, nul ne le supplée. Il fut le soutien, la ressource de notre ancienne France dans ses plus terribles crises. Au quatorzième siècle, au seizième, il siégea immuable et ferme, en sorte que, dans la tempête, la patrie presque perdue se reconnaissait, se retrouvait toujours au sanctuaire inviolable de la justice civile.

Eh bien, ce pouvoir est brisé.

Brisé de son inconséquence et de ses contradictions. Servile et hardi à la fois, pour le roi et contre