Ville, sous les yeux de l’autorité municipale, qui ne s’émeut pas. Cette autorité et les autres, si éveillées tout à l’heure, semblent endormies. Le lieutenant de police, le prévôt des marchands Flesselles, l’intendant Berthier, tous ces agents de la cour, qui naguère entouraient les élections de soldats, ont perdu leur activité.
La bande a dit tout haut qu’elle irait le lendemain faire justice chez Réveillon. Elle tient parole. La police, si bien avertie, ne prend nulle précaution. C’est le colonel des gardes françaises qui de lui-même envoie trente hommes, secours ridicule ; dans une foule compacte de mille ou de deux mille pillards et cent mille curieux, les soldats ne veulent, ne peuvent rien faire. La maison est forcée, on brise, on casse, on brûle tout. Rien ne fut emporté, sauf cinq cents louis en or[1]. Beaucoup s’établirent aux caves, burent le vin et les couleurs de la fabrique, qu’ils prirent pour du vin.
- ↑ Au dire de Réveillon lui-même : Exposé justificatif, p. 422 (imprimé à la suite de Ferrières). L’Histoire parlementaire est encore inexacte ici. — Elle fait de tout ceci, sans la moindre preuve, une guerre du peuple contre la bourgeoisie. Elle exagère l’étendue du mouvement, le nombre des morts, etc. Bailly, au contraire, et non moins à tort (p. 28 de ses Mémoires), le réduit à rien : « Je ne sache pas qu’il ait péri personne. » — Un témoignage très grave sur l’émeute Réveillon est celui de l’illustre chirurgien Desault, qui reçut à l’Hôtel-Dieu plusieurs des blessés : « Ils n’avaient l’air que du crime foudroyé ; au contraire, les blessés de la Bastille, » etc. (Voir l’Œuvre des sept jours, p. 411.) — Ce qui montrat bien que le peuple ne regardait point le pillage de la maison Réveillon comme un acte patriotique, c’est qu’il faillit pendre le 16 juillet un homme qu’il prit pour l’abbé Roy, accusé d’avoir excité cette émeute (Bailly, II, 51), et d’avoir plus tard offert à la cour un moyen d’égorger Paris. (Procès-verbal des électeurs, II, 46.)