L’industrie que nous avons créée hier, elle nous semble déjà notre embarras, notre fatalité. L’histoire, qui n’est pas moins que l’intelligence de la vie, elle devait nous vivifier, elle nous a alanguis au contraire, nous faisant croire que le temps est tout, et la volonté peu de chose.
Nous avons évoqué l’histoire, et la voici partout ; nous en sommes assiégés, étouffés, écrasés ; nous marchons tout courbés sous ce bagage, nous ne respirons plus, n’inventons plus. Le passé tue l’avenir. D’où vient que l’art est mort (sauf de si rares exceptions) ? c’est que l’histoire l’a tué.
Au nom de l’histoire même, au nom de la vie, nous protestons. L’histoire n’a rien à voir avec ces tas de pierres. L’histoire est celle de l’âme et de la pensée originale, de l’initiative féconde, de l’héroïsme, héroïsme d’action, héroïsme de création.
Elle enseigne qu’une âme pèse infiniment plus qu’un royaume, un empire, un système d’États, parfois plus que le genre humain.
De quel droit ? du droit de Luther, qui, d’un Non dit au pape, à l’Église, à l’Empire, enlève la moitié de l’Europe.
Du droit de Christophe Colomb, qui dément et Rome et les siècles, les conciles, la tradition.