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LOUIS XI

ne ; le roi n’y brilla que par l’humilité. Le duc, du haut de son cheval, et dominant la foule de ses pages, de ses archers à pied, « avoit la mine d’un empereur » : le roi, pauvre figure et pauvrement vêtu, allait devant, comme pour l’annoncer, Il semblait être la pour taire valoir par le contraste cette pompe orgueilleuse. On démêlait à peine les nobles Bourguignons, les gras Flamands, enterrés qu’ils étaient, hommes et chevaux, dans leur épais velours, sous leurs pierreries, sous leur pesante orfèvrerie massive. En tête, à la première entrée, sonnaient des sonnettes d’argent au col des bêtes de somme, habillées elles-mêmes de velours aux armes du duc ; ses bannières flottaient sur cent quarante chariots magnifiques qui portaient la vaisselle d’or, L’argenterie, l’argent à jeter au peuple, et jusqu’au vin de Beaune qui devait se boire a la fête[1]. Dans le cortège figurait, marchand et vivant. Le banquet du sacre, petits moutons d’Ardennes, gros bœufs de Flandre ; la joyeuse et barbare pompe flamande sentait quelque peu sa kermesse.

Le roi, tout au revers, semblait homme de l’autre monde. Il se montrait fort humble, pénitent, âprement dévôt. Dès minuit, la veille du sacre, il alla ouïr matines, communia. Le matin il était au chœur, il attendait La Sainte Ampoule qui devait venir de Saint-Rémi, apportée sous un dais. A peine sut-il qu’elle était arrivée aux portes, vite il y courut, « et se rua à genoux ». A deux genoux, mains jointes, il adora. Il

  1. App. 8.