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CHARLES VII. — PHILIPPE-LE-BON

Le duc s’aperçut alors de sa folie, il retira sa gabelle, il donna de bonnes paroles, caressa Bruges et l’apaisa. Les marchands, comme à l’ordinaire, aidèrent à calmer le peuple. Gand resta seule, et le duc crut ne venir jamais à bout de cette éternelle résistance, s’il ne changeait la ville même en ce qu’elle avait de plus vital, s’il n’y détruisait la prépondérance qu’y avaient prise les métiers[1], s’il ne la ramenait à la constitution qu’elle avait subie pendant l’invasion de Philippe-le-Bel ; la commune ainsi brisée, il eût brisé les confréries, y introduisant peu à peu des faux frères, des artisans des campagnes, en sorte que non seulement l’esprit de la cité, mais la population même changeât à la longue.

En 1449, tout cela semblait possible, parce que la guerre recommençant entre la France et l’Angleterre, le duc croyait n’avoir rien à craindre du côté du roi. Il barra les canaux, mit des garnisons autour de Gand, cassa la loi. La ville déclara hardiment que la loi serait maintenue. Le duc suivit la politique qui lui avait réussi en 1436, lorsqu’il s’était servi de Gand contre Bruges ; il recourut cette fois à l’intervention des Brugeois et autres Flamands contre les Gantais. Les États de Flandre se chargèrent de lire les privilèges de Gand ; ils y lurent que la loi était nommée par le

  1. Qui pouvait s’étonner que ceux qui faisaient la force de la ville, sa grandeur, qui contribuaient le plus en argent et en hommes, eussent la part principale au pouvoir ? Les deux chefs doyens des métiers influèrent peu à peu sur l’élection des échevins, et en vinrent jusqu’à juger avec eux. Sans une part à la puissance judiciaire, il n’y avait nulle puissance dans une telle ville, peut-être même nulle sûreté pour un corps et pour un parti. Voir Diericx, Mémoires sur Gand.