Page:Michelet - OC, Histoire de France, t. 5.djvu/305

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
295
CHARLES VII. — PHILIPPE-LE-BON

naître l’indépendance de l’Écluse et du Franc. Bruges indignée, par représailles, envoya des émissaires à Courtrai et autres villes dépendantes de Gand, pour les engager à s’en affranchir. Le capitaine de Gand fit décapiter ces émissaires ; il défendit qu’on portât des vivres à Bruges, et donna ordre que partout où les Brugeois paraîtraient, on sonnât contre eux la cloche d’alarme. Il fallut bien que Bruges cédât, qu’elle reconnût le Franc pour quatrième membre de Flandre.

C’était un beau succès pour le comte d’avoir brisé l’ancienne trinité communale, un plus grand d’avoir fait cela par les mains de Gand, d’avoir créé contre elle une éternelle haine, de l’avoir isolée pour toujours. Gand restait plus faible en réalité, par suite de cette triste victoire, plus faible et plus orgueilleuse, persuadée qu’elle était que le comte n’eût jamais pacifié la Flandre sans elle. La bannière souveraine de Flandre était-elle désormais celle de Gand ou celle du comte ? cela devait tôt ou tard se régler par une bataille.

Quoi qu’aient pu dire les chroniqueurs gagés de la maison de Bourgogne contre les Gantais, cette population ne paraît pas avoir été indigne du grand rôle qu’elle joua. Ces gens de métier, fort renfermés, connaissant peu le monde (en comparaison des marchands de Bruges), de plus, préoccupés des petits gains et des petites dévotions qui ne peuvent étendre l’esprit[1],

  1. Nombre de passages que je pourrais citer prouvent que, dès ce temps,