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TROUBLES DE L’ANGLETERRE

mité la ville de son maître. Alors, Somerset (s’il faut en croire ses accusateurs) fit par faiblesse une chose audacieuse, coupable ; il s’entendit avec les bourgeois, les encouragea sous main à demander qu’on se rendît ; la ville fut livrée[1]. Le capitaine échappa et s’en alla rendre compte, non pas à Londres, mais droit en Irlande, au duc d’York. Celui-ci, brusquement et sans ordre, quitte l’Irlande, traverse l’Angleterre avec une bande armée, et présente au roi une plainte humblement insolente.

Personne ne parlait encore du droit d’York, tout le monde y pensait. La reine ne pouvait se fier qu’à un seul homme, à celui qui avait droit dans la branche de Lancastre, à l’héritier présomptif du roi. Mais cet héritier était justement Somerset ; elle le fit connétable, lui mit en main l’épée du royaume au moment où il venait de rendre la sienne aux Français. Ce défenseur du roi avait assez de mal à se défendre, ayant perdu la Normandie. Il eut fallu du moins qu’il réparât ; pour réparation, on perdit la Guyenne.

Charles VII, ayant complété sa Normandie par Falaise et Cherbourg[2], avait envoyé, l’hiver, son armée au Midi. La milice nationale des francs-archers commençait à

  1. De plus, Somerset abandonna son artillerie. (Mathieu de Couci)
  2. L’artillerie française, toujours dirigée par Jean Bureau, fit preuve à Cherbourg d’une habileté toute nouvelle. Il établit ses batteries dans la mer même, au grand étonnement des Anglais : « Elle venoit là deux fois le jour néanmoins, par le moyen de certaines peaux et graisses dont les bombardes estoient revestues, oncques la mer ne porta dommage à la poudre ; mais aussi tost que la mer estoit retirée, les canonniers levoient les manteaux, et tiroient et jettent, comme auparavant, contre ladite place, dequoy les Anglois estoient fort esbahis. » (Jean Chartier.)