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HISTOIRE DE FRANCE

(cœurs) riens impossible[1]. Bureau prit pour armes trois burettes ou fioles ; mais le peuple, préférant l’autre étymologie, tout aussi roturière, tira bureau de bure et en fit le proverbe : Bureau vaut escarlate.

Ce Bureau était un homme de robe, un maître des comptes. Il laissa là la plume, montrant par cette remarquable transformation qu’un bon esprit peut s’appliquer à tout. Henri IV réforma les finances par un homme de guerre ; Charles VII fit la guerre par un homme de finance. Bureau fit le premier un usage habile et savant de l’artillerie.

La guerre veut de l’argent, Jacques Cœur sut en trouver. D’où venait celui-ci ? Quels furent ses commencements, on regrette de le savoir si peu. Seulement, dès 1432, nous le voyons commerçant à Beyrouth en Syrie[2]; un peu plus tard, nous le trouvons à Bourges argentier du roi. Ce grand commerçant eut toujours un pied dans l’Orient, un pied en France. Ici, il faisait son fils archevêque de Bourges ; là-bas, il mariait ses nièces ou autres parentes aux patrons de ses galères. D’une part, il continuait le trafic en Egypte ; de l’autre il spéculait sur l’entretien des armées, sur la conquête de la Normandie.

Tels furent les habiles et modestes conseillers de Charles VII. Maintenant, si l’on veut savoir qui les approcha de lui, quelle influence le rendit docile à leurs conseils, on trouvera, si je ne me trompe, que ce fut celle d’une femme, de sa belle-mère, Yolande

  1. C’est la devise qu’on lit encore sur la maison de Jacques Cœur, à Bourges. À la place du mot cœurs, il y a deux cœurs.
  2. App. 88.