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HISTOIRE DE FRANCE

de la chrétienté, qui souffraient tant de ces longues guerres. Mais il ne pouvait se décider ; sa conscience, son honneur de chevalier étaient engagés, disait-il, il avait signé ; de plus, n’était-il pas lié par la vengeance de son père ? Les légats du pape lui disaient qu’à cela ne tînt, qu’ils avaient pouvoir pour le délier de ses serments. Mais cela ne le rassurait pas encore. Le droit ecclésiastique ne semblant pas suffisant, on eut recours au droit civil : on fit une belle consultation où, pour laisser les esprits plus libres, les parties étaient désignées par les noms de Darius et d’Assuérus. Les docteurs anglais et français opinèrent, comme on devait s’y attendre, en sens contraire ; mais ceux de Bologne, qu’avaient amenés les légats, déclarèrent, conformément à l’avis des Français, que Charles VI n’avait pu conclure le traité de Troyes : « Les lois défendent que l’on traite de la succession d’un homme vivant, et annulent les serments contraires aux bonnes mœurs. Le traité contient d’ailleurs une chose impie, l’engagement du père de ne pas traiter avec son fils sans le consentement des Anglais… Si le roi avait un crime à reprocher à son fils, il devait se pourvoir devant le pape, qui seul a le droit de déclarer un prince incapable d’hériter. »

Le duc de Bourgogne laissait raisonner, supplier. Mais au fond, le changement qu’on demandait était déjà fait en lui ; il était las des Anglais. Les Flamands, qui tant de fois avaient forcé leurs comtes de rester unis à l’Angleterre, lui devenaient hostiles ; ils souf-