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DISCORDES DE L’ANGLETERRE. — ÉTAT DE LA FRANCE

« Nous en aurions eu davantage, disaient-ils furieux, au mariage d’un orfèvre[1]. » Encore, s’il y eût eu une légère baisse de taille ; point de baisse. On ne fit même pas la grâce économique de mettre dehors un prisonnier.

Et pourtant, il faut le dire, quand ils le voulaient bien, les Anglais savaient dépenser. Ils avaient fait, peu d’années auparavant, un immense gala que la ville paya par une taille établie tout exprès. La gloutonnerie de cette gent vorace[2] faisait l’étonnement de la foule affamée et béante. Dans un de leurs repas, le chroniqueur compte, outre les bœufs et les moutons, huit cents plats de menue viande ; en une fois, ils burent quarante muids[3].

Le jeune roi fut ramené par Rouen, logé au château, non loin de la Pucelle, le roi près de la prisonnière, sans que celle-ci en fut mieux traitée. Dans les temps vraiment chrétiens, ce voisinage seul eut sauvé l’accusée. On eût craint que si la grâce du roi ne s’étendait sur elle, elle n’étendit sur lui son malheur.

Il lui fallait recevoir encore une couronne à Londres. L’entrée royale fut pompeuse, mais grave, tout empreinte d’un caractère théologique et pédagogique ; les divertissements furent des moralités, propres à former l’esprit et le cœur d’un jeune prince chrétien. L’enfant royal entendit au pont de Londres une ballade chantée par les sept dons de la Grâce ; plus loin, il vit les sept Sciences avec la Sagesse, puis la figure

  1. Journal du Bourgeois.
  2. App. 73.
  3. Journal du Bourgeois, ann. 1424, 1423.