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PROCÈS ET MORT DE LA PUCELLE

bonne espérance au Seigneur ? — Oh ! oui, Dieu aidant, je serai en Paradis ! »

Il était neuf heures : elle fut revêtue d’habits de femme et mise sur un chariot. À son côté, se tenait le confesseur frère Martin l’Advenu, l’huissier Massieu était de l’autre. Le moine augustin frère Isambart, qui avait déjà montré tant de charité et de courage, ne voulut pas la quitter. On assure que le misérable Loyseleur vint aussi sur la charrette et lui demanda pardon ; les Anglais l’auraient tué sans le comte de Warwick[1].

Jusque-là la Pucelle n’avait jamais désespéré, sauf peut-être sa tentation pendant la semaine sainte. Tout en disant, comme elle le dit parfois : « Ces Anglais me feront mourir », au fond elle n’y croyait pas. Elle ne s’imaginait point que jamais elle pût être abandonnée. Elle avait foi dans son roi, dans le bon peuple de France. Elle avait dit expressément : « Il y aura en prison ou au jugement quelque trouble, par quoi je serai délivrée... délivrée à grande victoire[2]!... » Mais quand le roi et le peuple lui auraient manqué, elle avait un autre secours, tout autrement puissant et certain, celui de ses amies d’en haut, des bonnes et chères Saintes... Lorsqu’elle assiégeait Saint-Pierre, et que les siens l’abandonnèrent à l’assaut, les Saintes envoyèrent une invisible armée à son aide. Comment délaisseraient-elles leur obéissante fille ? elles lui

  1. Ceci, au reste, n’est qu’un on-dit (Audivit dici...), une circonstance dramatique dont la tradition populaire a peut-être orné gratuitement le récit. (Notices des mss.)
  2. App. 66.