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HISTOIRE DE FRANCE

sainte. — Si vous voulez avoir les sacrements de l’Eglise, il faut faire comme les bons catholiques et vous soumettre à l’Église. » Elle ne répliqua rien. Puis, le juge répétant les mêmes paroles, elle dit : « Si le corps meurt en prison, j’espère que vous le ferez mettre en terre sainte ; si vous ne le faites, je m’en rapporte à Notre-Seigneur. »

Déjà, dans ses interrogatoires, elle avait exprimé une de ses dernières volontés. Demande : « Vous dites que vous portez l’habit d’homme par le commandement de Dieu, et pourtant vous voulez avoir chemise de femme en cas de mort ? — Réponse : Il suffit qu’elle soit longue. » Cette touchante réponse montrait assez qu’en cette extrémité, elle était bien moins préoccupée de la vie que de la pudeur.

Les docteurs prêchèrent longtemps la malade et celui qui s’était chargé spécialement de l’exhorter, un des scolastiques de Paris, maître Nicolas Midy, finit par lui dire aigrement : « Si vous n’obéissez à l’Église, vous serez abandonnée comme une Sarrasine. — Je suis bonne chrétienne, répondit-elle doucement, j’ai été bien baptisée, je mourrai comme une bonne chrétienne. »

Ces lenteurs portaient au comble l’impatience des Anglais. Winchester avait espéré, avant la campagne, pouvoir mettre à fin le procès, tirer un aveu de la prisonnière, déshonorer le roi Charles. Ce coup frappé, il reprenait Louviers[1], s’assurait de la Normandie, de

  1. App. 56.