Page:Michelet - OC, Histoire de France, t. 5.djvu/12

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
2
HISTOIRE DE FRANCE

L’Imitation de Jésus-Christ, le plus beau livre chrétien après l’Évangile, est sorti, comme lui, du sein de la mort. La mort du monde ancien, la mort du moyen âge, ont porté ces germes de vie.


Le premier manuscrit de l’Imitation[1] que l’on connaisse, paraît être de la fin du quatorzième siècle ou du commencement du quinzième. Depuis 1421, les copies deviennent innombrables. On en a trouvé vingt dans un seul monastère. L’imprimerie naissante s’employa principalement à reproduire l’Imitation. Il en existe deux mille éditions latines, mille françaises. Les Français en ont fait soixante traductions, les Italiens trente, etc.

Ce livre universel du christianisme a été revendiqué par chaque peuple comme un livre national. Les Français y montrent des gallicismes, les Italiens des italianismes, les Allemands des germanismes.

Tous les ordres du sacerdoce, qui sont comme des nations dans l’Église, se disputent également l’Imitation. Les prêtres la réclament pour Gerson, les chanoines réguliers pour Thomas de Kempen, les moines pour un certain Gersen, moine bénédictin. Bien d’autres pourraient réclamer aussi. Il s’y trouve des passages de tous les saints, de tous les docteurs. Saint François de Sales a seul bien vu dans cette obscure question : « L’auteur, dit-il, c’est le Saint-Esprit. »

L’époque n’est pas moins controversée que l’auteur

  1. App. 1.